Cette citation (« Merci pour votre respect et du vent », pratiquement exacte) trouvée devant un monument aux morts, à Bourton-on-the-Water, ainsi que la playlist ci-dessous, créée pour le voyage correspondant, me paraissent représenter assez fidèlement l’esprit britannique. Pour peu que cela soit possible, bien entendu, et avec toutes les précautions nécessaires.
J’ai trouvé, en l’espace de quelques jours, une certaine tendance à l’ambivalence sur l’île d’Albion, caractérisée par une envie de se distinguer, ce petit détail a priori sans grande conséquence mais qui change l’ensemble en un tout inédit et introuvable ailleurs.
Ce sont les quantités de thés différents qu’un nuage de lait transforme en liquide marronnasse fade, les autoroutes à 112 km/h mais les petites routes de campagne à 96, l’amour des animaux et de la nature (ces jardins, même privés !) et la surconsommation comme l’abandon des emballages plastiques, d’appétissantes pies accompagnées de frites pâles et molles, une rébellion monstre contre la monarchie absolue au XVIIe et le maintien de privilèges royaux étranges, les High Streets qui concentrent les touristes d’une part, mais les maintiennent d’autre part à distance du reste des villes et villages… De toutes ces ambivalences, l’exclusion volontaire de l’Union européenne cohabitant avec la facilité et la chaleur du premier contact britannique n’est bien sûr pas la moindre.
On retrouve un peu de cette tendance dans la pop anglaise, porteuse d’un grain de folie que de nombreux Américains sont venus rechercher de l’autre côté de l’Atlantique (Bob Dylan, Kanye West, Jimi Hendrix, par exemple), quand la musique populaire américaine me semble plus attachée à la notion de pureté d’un genre ou d’un style. La capacité au décalage s’entend chez Queen, évidemment, mais aussi dans d’autres morceaux bien moins évidents : je pense par exemple à « Something in the Air » (1969), qui démarre comme une ballade gentiment révolutionnaire pour prendre ses distances dans un fracas de pianos malmenés avant de prendre une ampleur orchestrale. Ou « Reasons to Be Cheerful, Pt. 3 » (1979), qui s’éloigne de Londres pour se rapprocher de latitudes plus tropicales. « I Wanna Be Adored » (The Stone Roses, 1989), « I Fought the Law » (The Clash, 1977) ou « You Can’t Always Get What You Want » (The Rolling Stones, 1969) restent à mes oreilles, pour leur part, de fantastiques hymnes rock aux sonorités ou aux propos inattendus pour ce type de morceaux.
La playlist est accessible à cette adresse, sur Deezer. Elle contient des classiques, des succès de quelques semaines, des préférences bien sûr, et beaucoup de manques, mais il faut bien s’arrêter à un moment. Mieux vaut l’écouter en aléatoire, car les morceaux ne suivent aucun classement précis.